GRIMM BRÜDER

Title:BLANCHE-NEIGE
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Subject:GERMAN FICTION
Speaker:ACHIARY PIERRE
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Jacob et Wilhelm GRIMM


BLANCHE-NEIGE


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Cela se passait en plein hiver et les flocons de neige tombaient du ciel comme
un duvet léger. Une reine était assise à sa fenêtre encadrée de bois d'ébène et
cousait. Tout en tirant l'aiguille, elle regardait voler les blancs flocons.
Elle se piqua au doigt et trois gouttes de sang tombèrent sur la neige. Ce rouge
sur ce blanc faisait si bel effet qu'elle se dit : Si seulement j'avais un
enfant aussi blanc que la neige, aussi rose que le sang, aussi noir que le bois
de ma fenêtre ! Peu de temps après, une fille lui naquit ; elle était blanche
comme neige, rose comme sang et ses cheveux étaient noirs comme de l'ébène. On
l'appela Blanche-Neige. Mais la reine mourut en lui donnant le jour.
Au bout d'une année, le roi épousa une autre femme. Elle était très belle ; mais
elle était fière et vaniteuse et ne pouvait souffrir que quelqu'un la surpassât
en beauté. Elle possédait un miroir magique. Quand elle s'y regardait en disant
:
Miroir, miroir joli,
Qui est la plus belle au pays ?
Le miroir répondait :
Madame la reine, vous êtes la plus belle au pays.
Et elle était contente. Elle savait que le miroir disait la vérité.
Blanche-Neige, cependant, grandissait et devenait de plus en plus belle. Quand
elle eut atteint ses dix-sept ans elle était déjà plus jolie que le jour et plus
belle que la reine elle-même. Un jour que celle-ci demandait au miroir :
Miroir, miroir joli,
Qui est la plus belle au pays ?
Celui-ci répondit :
Madame la reine, vous êtes la plus belle ici
Mais Blanche-Neige est encore mille fois plus belle.
La reine en fut épouvantée. Elle devint jaune et verte de jalousie. À partir de
là, chaque fois qu'elle apercevait Blanche-Neige, son coeur se retournait dans
sa poitrine tant elle éprouvait de haine à son égard. La jalousie et l'orgueil
croissaient en elle comme mauvaise herbe. Elle en avait perdu le repos, le jour
et la nuit. Elle fit venir un chasseur et lui dit :
- Emmène l'enfant dans la forêt ! je ne veux plus la voir. Tue-la et
rapporte-moi pour preuve de sa mort ses poumons et son foie.
Le chasseur obéit et conduisit Blanche-Neige dans le bois. Mais quand il eut
dégainé son poignard pour en percer son coeur innocent, elle se mit à pleurer et
dit :
- 0, cher chasseur, laisse-moi la vie ! je m'enfoncerai au plus profond de la
forêt et ne rentrerai jamais à la maison.
Et parce qu'elle était belle, le chasseur eut pitié d'elle et dit :
- Sauve-toi, pauvre enfant !
Les bêtes de la forêt auront tôt fait de te dévorer ! songeait-il. Et malgré
tout, il se sentait soulagé de ne pas avoir dû la tuer. Un marcassin passait
justement. Il le tua de son poignard, prit ses poumons et son foie et les
apporta à la reine comme preuves de la mort de Blanche-Neige. Le cuisinier reçut
ordre de les apprêter et la méchante femme les mangea, s'imaginant qu'ils
avaient appartenu à Blanche-Neige.
La pauvre petite, elle, était au milieu des bois, toute seule. Sa peur était si
grande qu'elle regardait toutes les feuilles de la forêt sans savoir ce qu'elle
allait devenir. Elle se mit à courir sur les cailloux pointus et à travers les
épines. Les bêtes sauvages bondissaient autour d'elle, mais ne lui faisaient
aucun mal. Elle courut jusqu'au soir, aussi longtemps que ses jambes purent la
porter. Elle aperçut alors une petite maisonnette et y pénétra pour s'y reposer.
Dans la maisonnette, tout était minuscule, gracieux et propre. On y voyait une
petite table couverte d'une nappe blanche, avec sept petites assiettes et sept
petites cuillères, sept petites fourchettes et sept petits couteaux, et aussi
sept petits gobelets. Contre le mur, il y avait sept petits lits alignés les uns
à côté des autres et recouverts de draps tout blancs. Blanche-Neige avait si
faim et si soif qu'elle prit dans chaque assiette un peu de légumes et de pain
et but une goutte de vin dans chaque gobelet : car elle ne voulait pas manger la
portion tout entière de l'un des convives. Fatiguée, elle voulut ensuite se
coucher. Mais aucun des lis ne lui convenait ; l'un était trop long, l'autre
trop court. Elle les essaya tous. Le septième, enfin, fut à sa taille. Elle s'y
allongea, se confia à Dieu et s'endormit.
Quand la nuit fut complètement tombée, les propriétaires de la maisonnette
arrivèrent. C'était sept nains qui, dans la montagne, travaillaient à la mine.
Ils allumèrent leurs sept petites lampes et quand la lumière illumina la pièce,
ils virent que quelqu'un y était venu, car tout n'était plus tel qu'ils
l'avaient laissé.
- Le premier dit : Qui s'est assis sur ma petite chaise ?
- Le deuxième : Qui a mangé dans ma petite assiette ?
- Le troisième : Qui a pris de mon pain ?
- Le quatrième : Qui a mangé de mes légumes ?
- Le cinquième : Qui s'est servi de ma fourchette ?
- Le sixième : Qui a coupé avec mon couteau ?
- Le septième : Qui a bu dans mon gobelet ?
Le premier, en se retournant, vit que son lit avait été dérangé.
- Qui a touché à mon lit ? dit-il.
Les autres s'approchèrent en courant et chacun s'écria :
- Dans le mien aussi quelqu'un s'est couché !
Mais le septième, quand il regarda son lit, y vit Blanche-Neige endormie. Il
appela les autres, qui vinrent bien vite et poussèrent des cris étonnés. Ils
prirent leurs sept petites lampes et éclairèrent le visage de Blanche-Neige.
- Seigneur Dieu ! Seigneur Dieu ! s'écrièrent-ils ; que cette enfant est jolie !
Ils en eurent tant de joie qu'ils ne l'éveillèrent pas et la laissèrent dormir
dans le petit lit. Le septième des nains coucha avec ses compagnons, une heure
avec chacun, et la nuit passa ainsi.
Au matin, Blanche-Neige s'éveilla. Quand elle vit les sept nains, elle
s'effraya. Mais ils la regardaient avec amitié et posaient déjà des questions :
- Comment t'appelles-tu ?
- Je m'appelle Blanche-Neige, répondit-elle.
- Comment es-tu venue jusqu'à nous ?
Elle leur raconta que sa belle-mère avait voulu la faire tuer, mais que le
chasseur lui avait laissé la vie sauve et qu'elle avait ensuite couru tout le
jour jusqu'à ce qu'elle trouvât cette petite maison. Les nains lui dirent :
- Si tu veux t'occuper de notre ménage, faire à manger, faire les lits, laver,
coudre et tricoter, si tu tiens tout en ordre et en propreté, tu pourras rester
avec nous et tu ne manqueras de rien.
- D'accord, d'accord de tout mon coeur, dit Blanche-Neige.
Et elle resta auprès d'eux. Elle s'occupa de la maison. le matin, les nains
partaient pour la montagne où ils arrachaient le fer et l'or ; le soir, ils s'en
revenaient et il fallait que leur repas fût prêt. Toute la journéè, la jeune
fille restait seule ; les bons petits nains l'avaient mise en garde :
- Méfie-toi de ta belle-mère ! Elle saura bientôt que tu es ici ; ne laisse
entrer personne !
La reine, cependant, après avoir mangé les poumons et le foie de Blanche-Neige,
s'imaginait qu'elle était redevenue la plus belle de toutes. Elle se mit devant
son miroir et demanda :
Miroir, miroir joli,
Qui est la plus belle au pays ?
Le miroir répondit :
Madame la reine, vous êtes la plus belle ici,
Mais, par-delà les monts d'airain,
Auprès des gentils petits nains,
Blanche-Neige est mille fois plus belle.
La reine en fut bouleversée ; elle savait que le miroir ne pouvait mentir. Elle
comprit que le chasseur l'avait trompée et que Blanche-Neige était toujours en
vie. Elle se creusa la tête pour trouver un nouveau moyen de la tuer car aussi
longtemps qu'elle ne serait pas la plus belle au pays, elle savait que la
jalousie ne lui laisserait aucun repos. Ayant finalement découvert un
stratagème, elle se farda le visage et s'habilla comme une vieille marchande
ambulante. Elle était méconnaissable.
Ainsi déguisée, elle franchit les sept montagnes derrière lesquelles vivaient
les sept nains. Elle frappa à la porte et dit :
- J'ai du beau, du bon à vendre, à vendre !
Blanche-Neige regarda par la fenêtre et dit :
- Bonjour, cher Madame, qu'avez-vous à vendre ?
- De la belle, de la bonne marchandise, répondit-elle, des corselets de toutes
les couleurs.
Elle lui en montra un tressé de soie multicolore.
« Je peux bien laisser entrer cette honnête femme ! » se dit Blanche-Neige. Elle
déverrouilla la porte et acheta le joli corselet.
- Enfant ! dit la vieille. Comme tu t'y prends ! Viens, je vais te l'ajuster
comme il ...