GRIMM BRÜDER

Title:L'ÉLIXIR DE VIE
Subject:GERMAN FICTION Scarica il testo


Jacob et Wilhelm GRIMM


L'ÉLIXIR DE VIE


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Il était une fois un roi qui était malade et personne ne croyait qu'il resterait
en vie. Il avait trois fils et tous trois étaient fort affligés. Ils
descendirent au jardin du château et pleurèrent. Un vieil homme qui passait par
là leur demanda la raison de leur chagrin. Ils lui dirent que leur père était si
malade qu'il allait certainement mourir et qu'il n'y avait plus rien à faire.
Alors le vieillard leur dit :
- Je connais cependant un moyen de le sauver : c'est l'élixir de vie. S'il en
boit, il guérira. Mais cette eau merveilleuse est difficile à trouver.
L'aîné des fils dit :
- J'arriverai bien à la découvrir.
Il se rendit auprès du roi malade et lui demanda l'autorisation de partir à la
recherche de l'élixir de vie qui seul pourrait le guérir.
- Non, répondit le roi, le danger est trop grand. je préfère mourir.
Le prince insista tant que le roi finalement accepta. Et son fils se disait : «
Si j'apporte l'élixir, j'aurai la préférence de mon père et j'hériterai du
royaume. »
Il se mit donc en quête. Après avoir cherché pendant quelque temps, il aperçut
un nain devant lui sur la route. Le nain l'interpella :
- Où courez-vous si vite ?
- Sot avorton, répondit le prince avec hauteur, qu'as-tu besoin de le savoir !
Et il poursuivit sa route. Le nain était fort irrité. Il lui jeta un sort.
Bientôt le prince arriva dans une gorge profonde et plus il avançait, plus les
parois se rapprochaient l'une de l'autre. À la fin, la voie devint si étroite
qu'il ne put plus avancer d'un pas. Impossible de faire faire demi-tour au
cheval, ou de descendre de selle. Il était là comme enfermé. Le roi malade
l'attendit longtemps, mais il ne revint pas. Alors le second de ses fils dit :
- Père, laisse-moi partir à la recherche de l'élixir.
Et il pensait en lui même : « Si mon frère est mort, c'est à moi que reviendra
le royaume. » Tout d'abord, le roi ne le laissa pas partir. Mais, finalement, il
accepta. Le prince prit donc le même chemin qu'avait emprunté son frère et, lui
aussi, rencontra le nain. Celui-ci l'arrêta et lui demanda où il courait si vite
:
- Petit avorton, répondit le prince, cela ne te regarde pas !
Et il poursuivit sa route sans se retourner. La nain lui jeta un sort et, comme
son frère, le fils du roi s'enfonça dans une gorge, où il ne put ni avancer ni
reculer.
Comme son second frère ne revenait pas, le plus jeune demanda à son tour à
partir à la recherche de l'élixir. Le roi, à la fin, l'y autorisa. Quand le
prince rencontra le nain et que celui-ci lui demanda où il allait avec tant de
hâte, il s'arrêta, engagea la conversation et dit :
- Je cherche l'élixir de vie, car mon père va mourir.
- Sais-tu où tu le trouveras ?
- Non, répondit le prince.
- Parce que tu t'es comporté comme il convient et que tu n'es pas vaniteux comme
tes frères, je vais te dire où tu trouveras l'élixir de vie. Il coule d'une
fontaine située dans la cour d'un château enchanté. Mais tu ne pourras y
pénétrer, si je ne te donne une férule de fer et deux miches de pain. Avec la
férule, tu frapperas trois fois à la porte de fer du château. Elle s'ouvrira.
Dans la cour, il y a deux lions à la gueule grande ouverte. Si tu leurs lances à
chacun un pain, ils se tiendront tranquilles. Ensuite, tu te hâteras et tu
prendras l'élixir avant que minuit ne sonne. Sinon, la porte se refermerait et
tu serais prisonnier.
Le prince le remercia, prit la férule et les pains et se mit en route. Tout se
passa comme le nain l'avait prédit. La porte s'ouvrit au troisième coup et,
après avoir apaisé les lions avec le pain, il entra dans le château et arriva
dans une salle, grande et belle. Des princes victimes d'un sort qu'on leur avait
jeté s'y tenaient endormis. Il leur prit l'anneau qu'ils portaient tous au doigt
; il s'empara également d'une épée et d'un pain qui étaient là. Dans une autre
pièce, il vit une jolie jeune fille qu'il salua joyeusement. Elle lui donna un
baiser et lui dit qu'il l'avait délivrée du sort et qu'il recevrait son royaume
entier en remerciement. Et s'il revenait une année exactement plus tard, leurs
noces seraient célébrées. Elle lui dit aussi où se trouvait la fontaine d'où
coulait l'élixir. Il devait cependant se hâter et en prendre avant que sonnât
minuit. Il continua donc et finit par arriver dans une chambre où se trouvait un
beau lit invitant au sommeil. Comme il était fatigué, il décida de se reposer un
peu. Il se coucha et s'endormit. Quand il se réveilla, minuit moins le quart
sonnait. Effrayé, il sauta du lit, courut à la fontaine, prit de l'élixir dans
un gobelet qui se trouvait là et partit en courant. Mais, tout juste il passait
la porte, les douze coups de minuit sonnèrent et l'huis se referma si vite qu'il
en eut un morceau du talon coupé.
Il était cependant heureux d'avoir l'élixir de vie. Il reprit le chemin de la
maison et rencontra de nouveau le nain. Quand celui-ci vit l'épée et le pain, il
lui dit :
- Tu viens de faire une bonne affaire ! Avec l'épée, tu seras capable de défaire
une armée entière et le pain se renouvellera sans cesse.
Le prince ne voulait pas revenir chez son père sans avoir retrouvé ses frères.
Il dit :
- Cher petit nain, ne pourrais-tu me dire où sont mes frères ? Ils sont partis
avant moi à la recherche de l'élixir et ne sont pas revenus.
- Ils sont enfermés entre deux montagnes, répondit le nain. je leur ai jeté un
sort parce qu'ils étaient vaniteux. Le prince le supplia tant que le nain les
libéra. Mais il lui dit :
- Garde-toi d'eux ; ils ont mauvais coeur !
Quand ses frères arrivèrent, il se réjouit et leur conta ce qui était advenu
qu'il avait trouvé l'élixir de vie et en ramenait un plein gobelet qu'il avait
libéré du sort une jolie princesse , qu'elle l'attendrait pendant un an et que
leurs noces seraient célébrées ; qu'il recevrait un grand royaume. Ils partirent
tous trois sur leurs chevaux et parvinrent dans un pays où régnaient la famine
et la guerre ; son roi croyait déjà qu'il allait mourir, tant était grande sa
misère. Le prince vint vers lui, lui donna le pain et tous les habitants du pays
s'en nourrirent. Il donna également l'épée au roi. Grâce à elle, celui-ci
détruisit l'armée de ses ennemis et le royaume retrouva la paix et la
tranquillité. Le prince reprit son pain et son épée et les trois frères
poursuivirent leur chemin. Sur leur route, ils trouvèrent deux autres pays
encore, en proie à la famine et à la guerre.A chaque fois, le prince prêtait au
roi son épée et son pain. Il sauva donc ainsi trois royaumes. Ensuite, ils
montèrent dans un bateau et traversèrent la mer. Pendant le voyage, les deux
aînés s'entretinrent en secret.
- Notre cadet a trouvé l'élixir de vie et nous, rien du tout. Notre père lui
donnera le royaume qui nous revient. Il nous enlèvera toute chance.
Ils se mirent d'accord pour lui nuire. Ils attendirent qu'il fût profondément
endormi, prirent l'élixir dans son gobelet et le remplacèrent par l'eau salée de
la mer. Quand ils arrivèrent chez eux, le plus jeune apporta son gobelet au roi
malade pour qu'il y boive et recouvre la santé. Mais à peine en eut-il goûté
qu'il tomba plus malade encore qu'auparavant. Comme il s'en plaignait, ses deux
fils aînés vinrent auprès de lui et accusèrent leur cadet d'avoir voulu
l'empoisonner. Mais eux, lui dirent-ils, apportaient le véritable élixir de vie.
Ils le lui donnèrent. Dès les premières gouttes, il sentit que la maladie
l'abandonnait et se retrouva fort et sain comme au temps de sa jeunesse. Les
deux frères allèrent alors trouver le plus jeune et se moquèrent de lui, disant
:
- C'est bien toi qui as découvert l'élixir et qui as eu tout le mal ; mais c'est
nous qui en avons le bénéfice. Tu aurais été plus avisé de garder les yeux
ouverts : nous te l'avons pris pendant que tu dormais sur le bateau. Et dans un
an, l'...